Pierre Saladin-Villani
Né en 1999 en France
Texte de Julien Carbone pour l’exposition heures effleurées par des larmes de lumière
Comme des flashs qui s'impriment à la lisière de l'insomnie, les images réunies dans cette exposition surgissent dans l'interstice: ni tout à fait souvenirs, ni tout à fait visions. Elles s'offrent comme des rémanences sensorielles, des instants en suspension où les corps flottent entre retrait et présence, dans une forme d'abandon patient.
Pierre Saladin développe ici une peinture de l'atmosphère et de la latence. Ses figures ne posent pas, elles habitent. Absorbées, fatiguées, effleurées par une lumière qui ne révèle qu'à demi, elles occupent des lieux troubles : couloirs vides, pièces désertées, bords de nuit. L'espace n'y est jamais un simple décor, mais une zone d'indécision, un théâtre silencieux de l'errance et de l'intime.
Aucune narration linéaire ne s'impose. Plutôt un feuilleté de sensations, de fragments perceptifs. Chaque tableau agit comme un seuil : Les échappées, Leaving room, Nous étions trois, Heures perdues... Autant de balises dans une traversée intérieure, où le spectateur est invité non pas à interpréter, mais à ressentir.
La lumière joue un rôle central : diffuse ou tranchée, elle traverse les scènes, découpe les formes, ou au contraire les dissout dans une brume colorée. Elle confère aux œuvres leur tonalité onirique, leur vibration chromatique, leur qualité de vision hallucinée.
Dans cet ensemble, les corps ne sont pas les vecteurs d'une identité, mais les témoins d'un état. Ils disent la lassitude, la lenteur, parfois l'étrangeté d'être là. L'artiste, loin de l'affirmation, explore ces zones de retrait, ces moments vacillants où quelque chose résiste au langage.
Heures effleurées par des larmes de lumière compose ainsi un récit diffus et sensible, fait de seuils, de silences et de résurgences. Une invitation à traverser, sans s'y presser, les plis d'une temporalité autre - celle du regard ralenti, de l'émotion silencieuse, et d'une beauté à peine révélée.
Julien Carbone, juillet 2025
Text by Julien Carbone for the exhibition Hours touched by tears of light
Like flashes that are imprinted on the edge of insomnia, the images brought together in this exhibition emerge in the interstice: neither quite memories, nor quite visions. They present themselves as sensory afterimages, moments suspended in time where bodies float between withdrawal and presence, in a form of patient abandonment.
Pierre Saladin develops here a painting of atmosphere and latency. His figures do not pose, they inhabit. Absorbed, tired, touched by a light that only half reveals, they occupy troubled places: empty corridors, deserted rooms, the edges of night. Space is never a simple backdrop, but a zone of indecision, a silent theater of wandering and intimacy.
There is no linear narrative. Rather, there is a layering of sensations, of perceptual fragments. Each painting acts as a threshold: Les échappées, Leaving room, Nous étions trois, Heures perdues... These are all markers in an inner journey, where the viewer is invited not to interpret, but to feel.
Light plays a central role: diffuse or sharp, it crosses the scenes, cutting out shapes or, conversely, dissolving them in a colored mist. It gives the works their dreamlike tone, their chromatic vibration, their hallucinatory quality.
In this collection, bodies are not vectors of identity, but witnesses to a state of being. They express weariness, slowness, and sometimes the strangeness of being there. Far from making assertions, the artist explores these areas of withdrawal, these wavering moments when something resists language.
Heures effleurées par des larmes de lumière thus composes a diffuse and sensitive narrative, made up of thresholds, silences, and resurgences. It is an invitation to slowly traverse the folds of another temporality—that of the slowed gaze, silent emotion, and barely revealed beauty.
Julien Carbone, July 2025
Education:
2018 - 2019 / 2nd year ESBAMAMOCO, Montpellier(FR)
2017 - 2018 / 2nd year VFX ArtFx, Montpellier (FR)
2016 - 2017 / Atelier préparatoire d'arts appliqués, école de Condé, Paris (FR)